D’élève à maestro
Il est accepté à la prestigieuse Manhattan School of Music (MSM) pour devenir organiste, et travaille à l’église historique Church of the Heavenly Rest sur la 5e avenue à titre de directeur adjoint du programme de musique. Après avoir terminé sa maîtrise et son doctorat à la MSM (il pensait devenir enseignant), il est immédiatement nommé au poste de professeur de compétences au clavier et de professeur de théorie musicale, tout en menant une carrière de concertiste en tant qu’organiste et chef de chœur. En 2003, il décide qu’il veut devenir chef d’orchestre et d’opéra et recherche la possibilité de travailler avec Kenneth Kiesler, un professeur et chef d’orchestre de renom de l’Université du Michigan. Cette expérience l’amène à parcourir le monde, notamment à travailler pendant dix jours avec l’orchestre du Centre national des Arts dans le cadre de son programme de formation, ainsi qu’avec des orchestres en Allemagne, en Bulgarie, en Russie et en France. Chez lui, il est chef d’orchestre adjoint pour huit productions d’opéra dans le sud de Brooklyn, approfondissant ainsi ses connaissances du métier. La direction d’orchestre et les concerts le conduisent dans le monde entier.
« Ils n’ont pas besoin de quelqu’un pour compter jusqu’à quatre dans la Cinquième symphonie de Beethoven. » Pour être chef d’orchestre, il faut avoir une « vision complète du morceau de musique » et du rôle de chaque individu au sein de l’orchestre et cette vision est le fruit d’un parcours scolaire, d’un apprentissage et d’une expérience. Il est important d’apprendre les compétences individuelles d’un orchestre – être capable de lire couramment la partition complète, de lire la musique et de comprendre chaque instrument, ainsi que les autres compétences analytiques qui peuvent être enseignées, mais une expérience pratique est indispensable. Pour un chef d’orchestre, cela veut dire pratiquer et faire des erreurs/apprendre devant les musiciens, et parfois devant un public, ce qui peut être une belle leçon d’humilité. Pour Justin Bischof, D. Mus., le meilleur remède pour endurer un examen attentif et la pression est de mettre son égo de côté et de se concentrer sur la musique. « Les musiciens se moquent de vos antécédents. Ils sont surtout intéressés par la vision musicale et l’exécution. »
En 2004, il fonde son propre orchestre/compagnie d’opéra qui existe encore aujourd’hui sous le nom de Modus Operandi Orchestra (MOO). La mission du MOO, situé à New York, est de fournir aux meilleurs musiciens indépendants de la ville de New York l’occasion d’interpréter avec leurs collègues le grand répertoire symphonique et opératique ainsi que des œuvres contemporaines et des premières mondiales. Le MOO est en résidence à New York, à l’Église catholique St Mary.
Extraits du magazine New York Classical Review sur la prestation du MOO au Merkin Hall en novembre 2022
« Les cordes du Modus Operandi Orchestra ont fait leur début au Merkin Hall mercredi soir avec un programme profond, absorbant et une expérience musicale immensément satisfaisante. L’intimité de la salle a intensifié l’impact glaçant de la musique... qui a été rendue encore plus déchirante par l’approche lyrique de la partition de Justin Bischof. Ce dernier a donné un compte rendu très émouvant de l’œuvre, dans lequel les mélodies qui la traversent ont été soigneusement délimitées et façonnées de manière exquise. Il a permis à la musique de s’épanouir avec douceur, avant la fin sombre de l’œuvre. »
La musique pour et avec les autres
En 2007, Justin commence à organiser des concerts-bénéfice en utilisant sa passion pour la musique afin de redonner à la collectivité. Le Westchester Reform Temple à Scarsdale organise un camp d’été pour les jeunes à risque qui ne font pas partie de la communauté juive afin d’éloigner les adolescents des gangs pendant les mois d’été, lorsque les espaces sûrs sont rares. Inspiré par l’approche interconfessionnelle de cette synagogue pour redonner à la collectivité (là où Justin a été chef d’orchestre et pianiste pendant 14 ans), le maestro Bischof a participé, pendant 10 ans, à l’organisation d’un concert-bénéfice annuel qui a recueilli plus de un million de dollars américains, permettant ainsi à plus de 800 jeunes à risque de participer à un camp d’été qui change les vies. Le camp aide ces jeunes à surmonter leur peur des gangs de leur quartier et à développer les compétences et le courage nécessaires pour supporter le présent et imaginer un avenir meilleur. D’ailleurs, un grand nombre d’entre eux sont devenus moniteurs, un testament de leur expérience au camp, et ont fréquenté l’université.
Justin Bischof revient sur ses années de formation à Loyola comme étant une inspiration, particulièrement l’impact du programme de service chrétien (PSC) qu’il compare aux actions du temple juif. Dans le cadre de son PSC, il se souvient d’avoir visité une résidence pour personnes âgées et de s’être lié d’amitié avec une femme qui voulait créer une chorale, mais qui n’y parvenait malheureusement pas. Il a alors réalisé comment la musique pouvait réunir les personnes et créer un fort sentiment d’appartenance à une communauté.
À Loyola, la mission de redonner au suivant lui a été inculquée dès son plus jeune âge. Justin a découvert un corps enseignant et un personnel qui partageaient sa passion pour la musique, des enseignants comme Terry Brennan et Messieurs Enright et Khoury, Ph. D. Lors d’une visite scolaire à l’Office national du film du Canada (ONF), le jeune Justin se lie d’amitié avec un ingénieur du son qui a travaillé avec Glenn Gould (qui a déjà été l’idole musicale de Justin), l’un des plus grands pianistes canadiens du 20e siècle. C’est sur l’insistance de M. Brennan, qui a reconnu sa passion et l’a identifiée, que Justin accepte l’invitation de retourner à l’ONF pour apprendre plus, durant les heures de cours en plus (un exploit administratif dont s’est acquitté M. Brennan). Aujourd’hui, il reconnaît l’importance des gestes, petits, mais importants comme celui-ci, afin d’encourager les jeunes à « voir grand » et à prendre des risques.
L’encadrement des jeunes passionnés de musique est primordial pour Justin. Il recherche de jeunes professionnels qui font ensuite partie intégrante de son orchestre. Pour ceux et celles qui désirent entreprendre une carrière en musique, Justin souligne l’importance de la concentration, de la discipline et de la joie pour la musique, mais conseille aux jeunes de ne pas négliger le pouvoir de l’autopromotion. Il est important de ne pas faire cette dernière sans une bonne base dans la première, ce qu’il appelle un « emballement éphémère ». Il faut de la motivation et de la passion. Bien que Loyola ait posé les jalons, c’est à chacun de faire plus et mieux (ce que les jésuites appellent le Magis) pour avoir du succès.
« La musique est un cadeau que l’on partage. Elle est une force de transformation dans le monde. Elle peut engendrer de grands changements. »”
Transformer la vie des enfants grâce à la musique
Entre 2007 et 2017, Justin cofonde le concert annuel de bienfaisance pour les enfants afin d’aider les enfants à risque à Mount Vernon, New York. Ces concerts ont permis de recueillir la somme de 1 000 000 de dollars américains et d’envoyer plus de 800 enfants au camp d’été Wagon Road, situé sur un magnifique terrain boisé de 52 acres, avec des programmes qui proposent des activités de qualité en mettant l’accent sur le plaisir, la sécurité et l’amitié.
Publié à l'origine dans l'édition hiver/printemps 2023 du Loyola Today
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